Texte · Le sable

Écrit par

Le

Hélène,

 Ce soir, je t’écris sur le sable à l’aide de mon fidèle bâton pour la dernière fois, je crois. Ne m’en veux pas de ne pas avoir été capable de te donner de véritables nouvelles, je ne suis pas cet ange que j’ai prétendu être quand j’étais à tes côtés. Je me souviens aussi que tu avais ri de moi, croyant à une mauvaise blague. Je n’ai jamais réussi à te dire mon secret et chaque jour depuis que j’ai échoué sur cette île j’y repense sans cesse. Combien de fois j’ai eu l’occasion de te le dire ? Je crois bien que la peur du refus me terrassait et maintenant je regrette. J’ai passé toutes mes nuits à t’écrire sur le sable des mots qui s’envolent dès le lendemain. Pour m’en sortir, je me suis imaginé que les vagues, en grandissant, attrapaient mes mots et qu’elles repartaient avec, les envoyant jusqu’à toi, peu importe où tu te trouvais. C’est tellement ancré dans ma tête que j’ai fini par y croire. Cette nuit encore j’ai déjà englouti de mots la moitié de ce coin de plage sur laquelle je me suis réveillé un beau matin, amnésique. Le seul souvenir qu’il me reste, c’est la lune qui me l’a donné, le premier soir. C’est toi et toi seule, Hélène, l’étoile qui a atterri dans ma vie, l’étoile qui m’éclaire et repousse les orages. Rien qu’un souffle et tu entraînes avec toi une secousse dans tout mon corps. Malheureusement pour moi, c’est la fin de mon plaisir, mon plaisir à t’écrire avec la conviction que tu reçois mes lettres éphémères. Hélène, je pense que tu as compris l’issue de mon message, et aujourd’hui je risque fort de rejoindre la lune, si toutefois j’en suis digne. De si haut, je pourrai te revoir. Quand j’y serai, je deviendrai enfin cet ange dont je t’ai parlé il y a bien longtemps. J’espère que tu te souviens encore de moi, Hélène. Même si nous n’avons jamais vraiment été des amis, moi, j’ai été ton ami dans mon cœur, et bien plus que cela. Je vais très vite vivre dans les cieux, avec comme seule pensée mon amour pour toi. Ce sont aux vagues de

 Le naufragé fit une crise cardiaque et tomba sur le sable, le corps rongé par la famine. La lune qui a tout vu s’éclipsa, laissant les vagues glisser la dernière lettre qui disparut au fond de la mer.

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« Chacun a raison de son propre point de vue, mais il n’est pas impossible que tout le monde ait tort. »
– Gandhi.

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